vendredi 3 septembre 2010

Vrais Jeunes pour la vraie France des vrais Français

"Bon, parlons un peu politique..."

Terreur, stupeur et effroi. Devant l'écran de votre ordinateur, vous avez désormais les mains moites et les pieds poites, tandis qu'une tremblement incontrôlable secoue vos membres chétifs (oui, chétifs, parce que si vous êtes là, c'est que vous n'êtes pas dehors à faire du sport). Vous accédez là au tabou suprême en France : on ne parle pas politique.
Cela dit, vous sentez grandir en vous une excitation semblable à celle du journaliste irakien avant de lancer sa chaussure au visage de Georges W Bush ; vous savez que c'est interdit, mais ça fait plaisir quand même.

Oui, parce que parler politique en France, c'est interdit. Pour un peu d'amusement, essayez de lancer discrètement une fine allusion à la laïcité à l'école ou quelques mesures fiscales à un repas en famille ou entre amis, il ne se passera pas 3 minutes avant que les convives ne s'étripent joyeusement à grands coups de blanquette de veau à l'ancienne. Parce qu'en France, on ne peut pas être d'un avis politique ou religieux différent sans que ça implique de remettre tout le reste en cause. Pas de désaccord qui puisse être intéressant. Je suis un peu de mauvaise foi en disant cela ? Oui, c'est mon but et ma joie.

D'ailleurs, petite anecdote amusante, la guerre de sécession a éclaté après que Jefferson Davis ait abordé la question de l'immigration clandestine des esclaves africains en quête de travail aux USA au cours d'un repas entre amis avec Abraham Lincoln (l'immigration ou le téléchargement illégal, je ne me souviens plus bien).

Le dîner se passait bien, jusqu'à ce que Jean-Jacques commence à parler politique.

Petite exception à ce tabou, on peut souvent dire qu'on n'est pas d'accord. Soutenir un homme politique dans une de ses décisions un peu ambitieuse ? Ça ne va pas ? Par contre, balancer à tout bout de champ qu'on est contre tout ce qui est pour et pour tout ce qui est contre, ça passe, et ça passe d'autant mieux que votre interlocuteur possède un esprit critique semblable à celui d'un poulet nourri aux hormones.

Donc rassurez-vous, je ne vais faire que critiquer.
Ouf ! Vous poussez un soupir de soulagement et vous cessez de cacher l'écran de votre ordinateur. Vous irez même jusqu'à envoyer cet article à tous vos amis (dans les 20 secondes, sinon vous mourrez de manière atroce en essayant de manger de la panse de brebis farcie, sauf si vous êtes anglais, mais ceci est une autre histoire) pour leur conseiller cette lecture intellectuellement saine.

Pour commencer, éloignons-nous des partis les plus en vue, et donnons un coup de projecteur (de préférence assez fort pour qu'ils ne s'en relèvent pas) sur une section qui en vaille vraiment la peine : la section Jeunes du Mouvement Pour la France, le mouvement politique Philippe Le Jolis de Villiers de Saintignon, que nous appellerons la Mangouste pour simplifier. Parce que oui, il y a des jeunes au MPF (j'ai été surpris moi aussi au début ; ça fait un peu le même effet que si on nous apprenait que la femme parfaite existait, on en parle beaucoup, mais on ne la voit jamais).

Le dernier meeting des jeunes du MPF

Déjà, pourquoi tous les partis ont-ils une section "jeunes" ? Comme si les jeunes, cette espèce étrange, était une fierté que l'on voudrait exhiber ("Regardez ! On a des djeuns dans notre parti") mais ranger dans une case à part, au cas où ils racontent un peu trop de conneries et le temps qu'il finissent leur croissance. Et s'il y a une section jeunes, pourquoi n'y a-t-il pas une section vieux ? Remarquez, s'il y avait des section vieux, je connais certains partis où il n'y aurait plus grand monde dans la section régulière...

Je me concentrerai sur une page en particulier, pour éviter de se disperser (bien que ce ne soit pas mon genre), appelée Les fondamentaux.

Tout commence avec une superbe vidéo, parodie d'une publicité pour un marque de téléphonie dont le nom fait penser à un fruit qui est aussi une couleur entre le jaune et le rouge, et qui essaie de nous faire passer un message sur les valeurs du MPF. En résumé, on voit dans cette vidéo, pour chaque mot clé, le mal, dérive de la société moderne, puis la vision des jeunes du MPF. On y sous-entend à mots à peine couverts que tout ce qui a la peau plus bronzée qu'un descendant en droite ligne de Louis X le Hutin (ou que Michael Jackson) ne sait faire que tabasser d'honnêtes citoyens dans le bus, que leur musique est forcément vulgaire et grossière, mais aussi que la vraie culture des vrais français, c'est de la musique classique jouée par des jolies têtes blondes.

Passons rapidement sur tout cela pour étudier le coeur de l'article, divisé en trois parties.

Acte I : La famille, notre avenir
"Bien qu’une augmentation du temps de travail hebdomadaire, en supprimant véritablement les 35 heures, permette de stabiliser la situation, la solution reste essentiellement démographique. Les Jeunes Pour la France pensent que si l’Etat investissait dans la famille, en créant un salaire parental par exemple, cela amorcerait une augmentation de la natalité".
Nous avons là une idée intéressante : les 35 heures sont sans aucun doute possible une des causes majeure du déficit de la caisse des retraites. C'est vrai que du temps des 39 heures, on n'avait pas l'once d'un problème pour les retraites, et que passer 4 heures de plus au bureau à se toucher la nouille bosser dur permettra certainement de renflouer le déficit abyssal de la caisse des retraites (à ce sujet, il paraît d'ailleurs que plusieurs spéléologues essaient encore d'en trouver le fond).

Mais l'idée la plus intéressante n'est pas là ; les Jeunes Pour la France (appelons les JPF, ça nous rappellera Jean-Pierre Foucault) proposent la création d'un salaire parental. On tient là une idée vraiment innovante... Alors, supposons que cette mesure passe (avec beaucoup d'imagination). Qu'est-ce qui me pousserait à aller bosser alors que je peux rester à la maison avec mes gamins et être payé pour ça ? Nul doute que ça résoudrait le problème des retraites, on serait obligé de rappeler tous les vieux parce que plus personne ne voudrait bosser.
Est-ce que ça pousserait vraiment les gens à faire plus d'enfants ("Tiens chérie, ça fait déjà 3 mois que je suis au chômage, il va falloir penser à lancer un gamin si on veux toucher un salaire à la fin des indemnités") ? Parce que ce salaire de parent au foyer ne devrait pas atteindre des sommets, même si on en fait beaucoup. Et faire des hordes de lardons, ça coûte quand même un bras au fur et à mesure que ça grandit.

Cette jeune mère de famille a compris comment faire fortune. Quelques difficultés financières seront cependant à prévoir au moment où ces charmants bambins commenceront leurs études.

Et pour se réintégrer dans une vie de travail après 20 ans passé à élever des gnafrons, aucune difficulté. J'aime autant vous dire que la section "Crèches et nounous" de la CGT prévoit d'ores et déjà de manifester à ce sujet.

Par contre, les JPF n'envisagent apparemment pas de remonter l'âge légal de la retraite ou d'augmenter les cotisations. Non, ce serait un peu simple...

Acte II : Burqa, Niqab, Hijab, Tchador, c'est non !
"Il ne faudrait pas que l’interdiction de la burqa permette le port du hijab, du niqab et du tchador.
Certes, ces accoutrements dissimulent la femme dans une moindre mesure, mais ils restent des symboles religieux islamiques portant atteinte à la dignité de celle ci. L’islamisation et le communautarisme de notre société ne se résume pas au port de la burqa.
Le Mouvement Pour la France et les Jeunes Pour la France maintiennent que la France n’a pas vocation à devenir une terre d’islam."
La pauvre ne sait pas encore qu'elle va être renvoyée du lycée pour avoir porté un couvre-chef un peu trop islamique.

Le port du Hijab, voila un vrai problème de société. Une fille qui cache ses cheveux, c'est vrai que c'est un problème de société à ne pas négliger. Alors qu'une fille qui se promène en hiver avec un bonnet, un cache-nez et une écharpe, du moment qu'elle soit blanche (ce qui est encore plus le cas en hiver, ou toute l'année dans le Nord), on accepte.
Le vrai problème, c'est bel et bien qu'on pourrait reconnaître qu'elle est musulmane. Alors qu'une bonne soeur comme Mère Teresa qui se ballade avec son voile dans la rue, un juif avec son chapeau juif et ses rouflaquettes, une hindoue avec le tilak, ça ne pose aucun problème (dans le cas des hindous, probablement parce que personne ne connaît cette religion en France).

Passons sur l'usage du terme "accoutrement" (le terme pourrait aussi être utilisé en regardant les photos des membres du bureau national des JPF), et attardons nous sur "La France n'a pas vocation a devenir une terre d'islam". Apparemment, elle n'a pas vocation à devenir une terre d'accueil tolérante non plus. C'est bien connu que le communautarisme tant décrié par les JPF, ça ne concerne que les musulmans. Parce que rester entre blancs, catholiques, Français depuis le temps où Charles Martel a repoussé les basanés à Poitiers, et familles nombreuses, ce n'est pas du communautarisme du tout. C'est très différent, nous, on était là avant. Heureusement que ce sont les mêmes qui disent refuser l'uniformisation culturelle : "Mélangeons nos cultures en restant entre nous".

L'Église catholique prend position contre le port du voile.

Quand on sait que les catholiques pratiquants représentent 8,5 % de la population française et les musulmans 6 %, la première religion étant l'athéisme, suivie de près par l'agnosticisme, je me dis qu'on devrait même leur interdire de construire des mosquées. Ça risquerait de refléter notre diversité, ce serait quand même dommage...

Acte III : Taxes, charges, impôts... c'est trop !
"Ce n’est donc pas en prélevant près de 50% des salaires bruts des français que nous relancerons notre consommation. La pression fiscale qui règne en France oppresse les ménages et pénalise notre économie.
[...] Nombre de dépenses de l’Etat peuvent être réduites, en ne remplaçant pas un fonctionnaire sur deux, en stoppant l’immigration (38 milliards d’euros) ou tout simplement en rétablissant l’ordre".
Là, je pense qu'on peut aisément deviner que ceux qui ont écrit ces quelques lignes ont fait de hautes études d'économie. Déjà, je serais curieux de savoir comment ils évaluent le coût de l'immigration. Et ils ont certainement aussi tenu compte de tous ceux qui viennent en France pour travailler et occuper les postes dont personne ne veut, comme dans le bâtiment, et créent de la valeur ajoutée chaque jour qu'ils passent sur le territoire. Mais non, car c'est bien connu que tous les arabes-musulmans-intégristes-clandestins (c'est synonyme) ne viennent en France que pour profiter sans rien faire des allocations, qu'on s'empresse de leur verser, malgré leur situation illégale. D'ailleurs, avec un salaire de parent, ce serait vachement plus facile pour tous les immigrés de trouver du travail, non ? 

Par contre, réduire les impôts va certainement renflouer les caisses de l'état. Car c'est bien connu que tout ce qu'on achète avec nos réductions d'impôts est 100% pur franchouillard. Pas de "made in China", de pétrole de la péninsule arabique ou ce genre de chose.
Et puis c'est vrai que ceux qui payent 50% d'impôts sont ceux qui ont les salaires les plus bas (les ménages oppressés, nous dit-on), et qui en ont le plus besoin. Si on réduit les impôts, aucun risque qu'ils l'investissent dans un paradis fiscal, une île aux Bahamas, ou une villa aux Seychelles, ce sont de bons patriotes qui s'empresseront de relancer la croissance en achetant davantage de saucisson Cochonou et des Clios fabriquée par Renault.

Avec 50 % d'impôts sur son revenu, Liliane B. peine à boucler les fins de mois dans sa maison à l'île d'Arros Saint-Germain des Fossés

Non, pour pouvoir enfin baisser nos impôts, mieux vaut renvoyer les arabes chez eux (parce qu'immigration veut dire arabe et non qualifié, bien sûr, on ne parle pas des suédois, des américains, des ingénieurs marocains, ou des médecins lybiens...).
Et la dette de la France, qui absorbe désormais chaque année plus que la totalité de l'impôt sur le revenu ? Le budget militaire ? Le train de vie de l'état ? Les robes de Bernadette Chirac ? Non, virer les arabes reste le moyen le plus sûr d'assurer notre richesse.

Quand je vois qu'un de leurs slogans est "Pour la dignité de l'Homme, combattons les idéologies", je me dis qu'on n'a pas fini d'entendre des conneries en politique... En même temps, tant mieux ; ça nous permettra de continuer à critiquer les politiques !

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